Histoire d'une découverte, classée monument historique
Classé monument historique N° MH 28-10-1916.>>> accés site Ministère de la culture
Le monument le plus remarquable que nous possédons à LOUIN est assurément l'hypogée Gallo-romain.
Il a été découvert au mois de mars 1898 par le père de M. Albert Moreau, Clément Moreau - Baranger, cultivateur à Louin (la rumeur dit aussi, qu'en réalité, ce serait son ouvrier qui l'aurait découvert). Voulant procéder à une plantation sur sa parcelle du Champ des Chênes, en creusant, il eut l'attention attirée par un massif en maçonnerie qui lui parut très ancien. En explorant plus profondément il dégagea une porte d'entrée, qui se trouva murée.
M. Arthur Bounault, le conservateur du musée Lapidaire de Niort, s’est rendu à Louin dès le 15 mars, sur l'invitation de M. le Docteur Bouchet, de SAINT-LOUP. Ils ont immédiatement procédé ensemble à l'exploration méthodique du caveau et des tombes.
Le lendemain, le Père Camille de La Croix, l'archéologue le plus réputé de la région, membre du comité des travaux historiques, s'y rendait également. Auparavant, il avait découvert la villa gallo-romaine de SANXAY et l'hypogée de POITIERS. Il vint donc à LOUIN, étudia le monument et data l'édifice. Sans inscriptions ni dans le caveau ni sur les sarcophages; mais à la façon dont les plaques de plomb sont ajustées et soudées, les détails de forme des pierres tumulaires, l'appareil de l’édicule, permettront au Père de La Croix d’affirmer que le monument funéraire païen de Louin remontait à la fin du IIIe ou au commencement du IVe siècle de notre ère. Il affinera cette date ; au IVe siècle. N’oublions pas que c'est à cette époque que Saint Martin et Saint Hilaire parcouraient nos régions, pour faire connaître la religion chrétienne, mettant en doute cette datation... La fin du IIIe siècle serait plus proche de la réalité.
Il prit également quelques notes qui lui servit pour son exposé à la Sorbonne au Congrès des Sociétés savantes et que nous sommes heureux de pouvoir utiliser. Il annonça dans un article parut à POITIERS, l’écriture d’un livre sur cette découverte qui, hélas, ne verra pas le jour. Peut-être un mauvais ressenti après l’abandon de ses projets pour le site ?
Cette découverte fit grand bruit puisque les journaux locaux et nationaux comme La Gazette d’Airvault, l’Echo de Jarnac, Le Figaro et La Gazette de France s'en emparèrent et publièrent cette nouvelle (pour ne citer qu’eux, articles dans la galerie photos). Cette publicité et le bouche à oreille provoqua une grande fréquentation du site. M. Moreau Baranger a eu l'heureuse idée de réclamer un droit d'entrée de 0 fr. 25 pour chaque visiteur afin de pouvoir financer le déblayage complet du monument. A noter qu’en un dimanche les recettes s'élevaient à 80 fr.
Le Père de La Croix, autorisé par le propriétaire, fit pratiquer des fouilles au-dessus du caveau. Après quelques jours de recherche, il sera heureux de découvrir des substructions très complètes, appartenant à un temple, dont la forme est particulièrement originale. Cette découverte est extrêmement précieuse en ce sens qu'elle n'a pas de similaire en FRANCE.
Pour couvrir ces substructions et pour protéger l'hypogée gallo-romain le P. de la Croix proposa un projet de hangar, et demanda au Congrès des Sociétés savantes et aux Antiquaires de France une subvention de 7.000 frs (or) pour sa construction. En parallèle, le révérend père de la Croix organisa une souscription auprès des maires, notables et ecclésiastiques du département. Malgré tous ses efforts et par manque de financement rien ne fut réalisé. Ce site alors vécu au gré de la météo, laissé à l'abandon, les substructions avaient même disparu.
A la fin du XXe siècle, de nouvelles fouilles furent entreprises qui ont permis de retrouver les traces du temple et une cinquantaine de sépultures gallo-romaines de l'époque mérovingienne. L'ensemble du site fut restauré par le service des monuments publics à la fin des fouilles en 1994.
C’est ce que vous pouvez découvrir aujourd’hui lors de votre visite.
L’Hypogée Gallo-romain à sa découverte, d’après la description du Père Camille de La Croix :
La porte était fermée par des carreaux de terre cuite de 35 centimètres de côté et de 3 centimètres d'épaisseur. Celle-ci mesurait 2,28 m de hauteur sur 1,10 m de largeur; elle était recouverte par une plate-bande et protégée par une section d'arc de décharge formée des mêmes carreaux, ce qui lui communiquait une physionomie gallo-romaine très caractérisée.
Le déblaiement de cette porte a permis d'accéder dans une chambre sépulcrale rectangulaire, voûtée en plein cintre, et mesurant 4,28 m de longueur sur 2,95 m de largeur, avec 3,40 de hauteur sous voûte. Les murs présentent à la porte une épaisseur de 1,38m. Ils sont revêtus intérieurement d'un enduit qui présente encore quelques traces de polychromie. La porte seule ayant été dégagée, il n'a pas été possible de reconnaitre l'aspect extérieur du monument funéraire.
Le caveau funéraire très ancien contenait deux cercueils de pierre, intacts, alignés dans le sens du grand axe de la salle. Ils sont, l'un et l'autre, formés d'une auge rectangulaire, appuyée sur un sol bétonné, et surmontée d'un couvercle en dos d'âne. Le plus grand mesure 2,30 m de long, sur une largeur de 0,76 m, et une hauteur totale, couvercle compris, de 0,97 m. La partie creuse de l'auge présente, vers l'extrémité recevant le tronc et la tête, un épaulement de 6 cm, et le couvercle est recreusé en dessous dans un espace correspondant à l'ouverture de l'auge, comme si le cercueil n'avait pu se loger en entier dans cette dernière. Il est formé d'un calcaire fin à cassure conchoïdale, sorte de marbre analogue, d'après le Père de la Croix, au marbre de Saint Béat (Haute-Garonne). Il y eût dans cette région pendant toute l'occupation romaine des ateliers où l'on fabriquait des sarcophages que l'on expédiait par voie d'eau dans toute la Gaule.
Le second tombeau, plus petit, ne mesure que 1,55 m de longueur sur 0,70 m de large avec une hauteur totale de 0,95. Il est fait de calcaire grossier des environs d'Airvault.
Dans le grand sarcophage un cercueil en plomb protégeait le squelette d'un homme d'environ trente-cinq ans. L'auge presque entière était remplie d'eau, dans laquelle on a retrouvé des lambeaux d'étoffe garnis de filigrane d'or. Ce dernier détail indiquait certainement un personnage de marque. Le second cercueil, également envahi par l'eau, contenait les restes d'un enfant d’environ cinq ans.
On n'a trouvé aucun bijou relate les différentes sources écrites sur le sujet, pourtant d'après une information orale de la famille Moreau, transmise de génération en génération, des bijoux auraient été trouvés... Que sont-ils devenus ? Serait-ce une légende ? En revanche, deux pièces de monnaie frappées à l’effigie l’une de l’empereur Alexandre et l’autre de Constantin seront retrouvées dans le tombeau et qui permettront au Père de La Croix de dater l’édifice. Autre objet recueilli, aux pieds du squelette de l'adulte, gisait une amphore en verre d’une grande finesse, d'un blanc laiteux et d'une très grande rareté dit-on, de forme très allongée, mesurant 56 centimètres de longueur avec un diamètre de 12 centimètres à la panse. Cette amphore fit partie de la collection Georges Turpin, Collectionneur et amateur d'art (il légua en 1928 à sa ville natale l'ensemble de ses collections, que vous pouvez admirer dans son musée à Parthenay). Un archéologue originaire de Paris, M. Granier, l'aurait acquise au mois de mai 1915, pour la somme de 500 Francs de l'époque, Vente certifié par une lettre de l’architecte du département datée du 15 septembre 1915.
Archives du Père Camille de La Croix : source Archives Départementales de la Vienne / SAO, fonds Camille de la Croix.
L'amphore et une représentation des pièces de monnaie retrouvées dans le tombeau
Documentaires : Source gallica.bnf.fr / Médiathèque François-Mitterand / Poitiers
Déclaration du site de l'Hypogée de LOUIN faite par l'Abbé de la CROIX en 1898.
Revue d'archéologie poitevine de 1898.
Bulletinde la société des antiquaires etdes musées de Poitiers de 1952.
Un mausolée en Panonie semblable à celui de Louin. Document de 1990.